Les souffleries

Au début du XXème siècle, les souffleries apparaissent pour expérimenter les aéroplanes à partir de maquettes dans des conditions proches du vol réel. Ainsi, les accidents d’aviation vont diminuer. En parallèle, différentes méthodes étudient l’aérodynamisme : la chute libre guidée pour la gravité (Eiffel, 1908), le déplacement dans l’air au moyen d’un train pour le mouvement rectiligne (à l’Institut aérotechnique de Saint Cyr, 1909) ou à l’aide d’un manège pour le mouvement circulaire (Saint Cyr, 1906).

Gustave Eiffel, aux prises avec les problèmes de tenue au vent de ses constructions métalliques, s'est intéressé à l'aérodynamique et à la météorologie. Après ses recherches sur la résistance de l'air entreprises à la Tour avec son appareil de chute, il va poursuivre ses expériences  dans la soufflerie du Champ de Mars, puis dans celle d'Auteuil.

 

La soufflerie du Champ de Mars

Gustave Eiffel est sollicité par les aviateurs pour tester l’aérodynamisme. Il considère que l’emploi d’un manège donne des résultats trop imprécis. Il veut construire un laboratoire au pied de la Tour, la soufflerie du Champ de Mars (1909-1911). Il entend comparer les expériences sur la chute des corps menées à la Tour en condition réelle avec les résultats obtenus à la soufflerie. 

Gustave Eiffel fait innover le dispositif du ventilateur des laboratoires existants. La soufflerie du Champ de Mars est constituée d’un ventilateur aspirant entraîné par un moteur de 70 ch. alimenté par la station électrique de la Tour. Il remplace une partie des parois du tube par une chambre hermétiquement close et dispose la plaque à l’entrée. Ainsi, il parvient à maîtriser la direction et la vitesse d'un courant d’air allant de 10 à 20 m/seconde.

Les expériences deviennent précises et reproductibles. Gustave Eiffel  confirme d'abord les résultats obtenus avec son appareil de chute. Cette soufflerie utilise, comme les souffleries modernes, le principe de mouvement relatif : les forces exercées sur un corps au repos dans un courant d'air sont égales aux forces que subit un corps qui se meut à la même vitesse dans l'air au repos. Gustave Eiffel va ainsi mener de multiples expériences et mettre au point plusieurs procédés pour les constructeurs d'avions de l'époque.

En 1912, un projet d’urbanisme oblige Gustave Eiffel à quitter le Champ de Mars et à installer une nouvelle soufflerie dans le quartier d’Auteuil.

 

 

La soufflerie d'Auteuil

L'installation inaugurée le 19 mars 1912, est réalisée suivant les mêmes principes que celle du Champ de Mars. La soufflerie se perfectionne grâce à l’interposition d’un diffuseur (brevet de 1911) entre la chambre d’essais et le ventilateur, permettant une diminution de la puissance tout en ayant une accélération de la vitesse maximale d’écoulement de l’air : la vitesse du flux d'air peut atteindre 40 m/seconde  pour une énergie nécessaire inférieure à 50 ch., performances inégalées à l'époque.

Les moyens de mesure ont également été totalement renouvelés et améliorés par rapport à ceux du Champ de Mars. La conception originale de l'installation lui vaudra le nom de "chambre Eiffel".

Soufflerie d'Auteuil

Entre 1912 et 1913, la soufflerie d'Auteuil teste 17 modèles d'avion. Gustave Eiffel propose aux constructeurs de faire des essais gratuitement en échange de la publication des résultats. Chaque essai de maquette donne lieu à un procès verbal avec tracé de polaire et commentaires pour perfectionner l'appareil.

 

Classée monument historique, la soufflerie appartient maintenant au CSTB qui y exerce une activité scientifique au service de l’industrie et du génie civil.

 

 

 

Les appareils de mesure

Les principaux appareils de mesure en soufflerie sont de deux types : les balances pour déterminer les performances de l’avion (résistance à l’avancement, portance) et les girouettes pour déterminer les mouvements de l’avion autour de son centre de gravité, autrement dit sa stabilité dans les 3 axes. 

 

 

 

La balance aérodynamique

Gustave Eiffel invente une balance aérodynamique inspirée de la balance classique, avec fléau, couteaux et plateau. Il cherche à mesurer les poussées sur les surfaces exposées au courant d’air. Il calcule ainsi le moment de l’effort de l’air. Cette balance permet d’étudier la résistance de l’air en fonction des formes des plaques. Elle permet d’évaluer les profils des ailes, la forme des fuselages et de l’avion dans son ensemble. A Auteuil, il perfectionne le système pour la Grande balance en introduisant un ressort attaché au fléau pour permettre l’équilibre. 

Dans les souffleries du Champ de Mars et d’Auteuil, la mesure de  la poussée ou portance  et de la trainée sur la surface exposée au flux d’air se faisait à l’aide de cette balance spéciale imaginée par Gustave Eiffel, balance restée en service à Auteuil jusqu’en 1962.

Le modèle était placé sur un support lié à la balance.  La pesée du modèle est la différence entre la pesée du modèle dans le vent et sans vent. Les coefficients de portance et de trainée sont déterminés à partir de la valeur de la pesée, de la vitesse du vent et de la surface du modèle et permettent de tracer la polaire du modèle. Contrairement à la balance Eiffel, dans laquelle le modèle est fixé à la balance, la plupart des  balances utilisées sont des balances dites à fils, la suspension du modèle et sa liaison avec la balance étant assurée par des fils d’acier.

Il invente aussi la balance pendule pour les objets de faible résistance comme la sphère. Le manipulateur, sur le pont, agit sur le fléau pour compenser la charge du plateau. 

La girouette aérodynamique

Le système de la girouette permet une observation plus directe de la stabilité des avions. Une plaque de métal s’oriente comme une girouette autour d’un axe vertical dans le vent de la soufflerie. En modifiant la position de l’axe, l’incidence varie et la position du centre de poussée peut être déduite. 

La maquette de l’avion est placée entre deux pointes sur un axe vertical et on fait varier l’angle d’incidence de la maquette pour un flux d’air donné, ce qui permet de déterminer pour ces conditions la position du foyer de l’avion en tangage ainsi qu’en roulis et lacet. La stabilité de l’avion est déterminée dans les 3 axes à partir de la position du centre de poussée par rapport au foyer.

La lunette d'observation

Gustave Eiffel met au point une lunette d’observation pour mesurer les variations d’incidence et les déformations des objets sans entrer dans la soufflerie.

 

 

Bibliographie

Les expériences en aérodynamique 

 

Les essais aéronautiques
Documents disponibles aux archives de la Société Aérodynamique Eiffel.

  • Notes d'essai sur l'avion biplan Breguet type 20
  • Notes d'essai sur l'avion biplan Breguet type V
  • Notes d'essais de température sur des flotteurs, avions Breguet, février 1912
  • Diverses notes d'essais sur des avions tandem Breguet, 1912
  • Diverses notes d'essais sur des avions Breguet, 1913
  • Notes d'essai de température sur un avion tandem Breguet, août 1913
  • Diverses notes d'essais de température sur l'avion biplan Breguet, septembre-novembre 1913
  • Diverses notes d'essais sur des avions Breguet, février-juillet 1914
  • Courrier de Gustave Eiffel à Louis Breguet, au sujet d'essai sur un avion, 1915
  • Lettre de Gustave Eiffel à Monsieur Blériot, 9 novembre 1915
  • Brevet : Avion de chasse à grande vitesse